Y'A Plein D'Mots Comme Ça (Solitude)
Y'a des matins où rien ne paraît facile
Des souvenirs, voies de garage inutiles
Des restes de vieux airs qu'on va oublier dans la rue
À peine sorti, j'tombe sur un homme tout en blanc
Il m'dit "Petit, il se passe quelque chose de troublant
J'sais pas si c'est l'sommeil ou l'soleil
Mais j'sens une drôle d'odeur, j'crois qu'c'est une odeur de sang"
Solitude, c'est un mot, ça d'vient vite une habitude
Solitude, habitude, certitude, lassitude, y'a plein d'mots comme ça
Un peu plus loin, mon ami Pierre se balade
J'lui dis trop rien, j'le trouve vert, l'air malade
Dans ses yeux délavés pleins d'buée
Je vois comme un désert et dedans y'a mon reflet
Rue d'Charleville, je croise un certain Arthur
Il m'dit "Poète, t'as plutôt la vie dure"
Dans ses yeux délavés pleins d'buée
Je vois comme un désert et dedans y'a mon reflet
Solitude, c'est un mot, ça d'vient vite une habitude
Solitude, habitude, certitude, lassitude, y'a plein d'mots comme ça
Les gens qu'j'croise changent tous de trottoir
J'en ai même vu qui sortaient leur mouchoir
J'aim'rais bien leur parler, c'est raté
J'entends un vieux qui dit qu'c'était pire, les tranchées
J'comprends plus rien quand une nana se ramène
Elle tend un papier, j'crois que c'est pour dire qu'elle m'aime
Mais je lis "élection, piège à cons"
Et elle crie "Camarade, les idées coulent sur ton veston"
Solitude, c'est un mot, ça d'vient vite une habitude
Solitude, habitude, certitude, lassitude, y'a plein d'mots comme ça
Papa, si tu m'voyais, toi qui m'traitais d'artiste
Toi qui me reprochais de ne pas être réaliste
T'as loupé ce tableau, c'est le plus beau
Je peins le trottoir en rouge sans me servir de pinceaux
La femme que j'aimais compose mon épitaphe
J'peux pas dire que dans ma vie, elle ne laisse pas de trace
Ils sont encore tout chauds les ciseaux
Qu'avec délicatesse elle a planté dans mon dos.