QUAND NOUS AURONS CENT ANS
Quand nous aurons cent ans et cent jours et cent nuits
Que nos petits-enfants auront fait des petits
Quand nos bras d’allumettes s’effriteront d’un coup
Que le poids de nos têtes écrasera nos cous
Que nous restera-t-il pour finir en beauté ?
Quand nous aurons cent ans et de beaux souvenirs
De nos corps s’aimantant comme deux gouttes de cire
Quand la moindre caresse aura l’air d’un cent mètres
Et que ta vieille maîtresse aura perdu son maître
Que nous restera-t-il pour finir en beauté ?
Quand nous aurons cent ans dans nos cœurs de sauvages
Dans nos yeux presque blancs nos cheveux de passage
Quand nos cils tomberont comme d’un arbre à hélices
Que nos jambes n’auront jamais été si lisses
Quand nous aurons cent ans et la révolte sèche
Que l’inertie des temps aura brisé nos flèches
Quand la fatalité nous fera dire tant pis
Et qu’un point de côté nous mettra au tapis
Quand nous aurons cent ans de regard en arrière
Que ce qui nous attend sera déjà derrière
Quand revenus de tout et dépassés par tous
Nous attendrons surtout une sortie très douce
Que nous restera-t-il pour finir en beauté ?
Il nous restera ça : ton rire qui se faufile
Étincelant, immédiat entre mes mots futiles
Mon rire qui prend sa source à ton esprit fissa
J’espère qu’en bout de course… il nous restera ça