FRACTURE PART 1

Pierre Yves FILY

Fracture part. 1

J’ai avalé vos peines et dévalé vos pentes. J’ai vu vos visages s’illuminant face aux affres de vos pairs. J’ai perdu tout repère dans une atmosphère suffocante. Fracture ouverte, cela n’a plus d’importance. J’ai mis l’Amour sous verre et je me souviens de tout. Le doute me bouffe et tous mes cris deviennent doubles. Parce que vos regards sont troubles, et vos yeux gris, j’étouffe. L’air est pesant, les réponses floues. Je vous ai vus boursouflés par la haine, vous vies à bout de souffle. Mais c’est mentir de crier au secours. Demander pardon sans regretter. Demander de l’amour, et me braquer un putain de gun contre mon cou. J’ai survécu à vos coups, et à la casquette que j’ai survêtue. Il faut dire que je vous aime beaucoup. Au moins autant que cela me tue.

Toujours en quête de liberté, de la maternité à la tombe, de la vapeur d’idée me plombe. En vain je chasse la colombe, je sors du cycle, enfin je retombe. Attiré par les ombres, j’étais le premier à tirer. Aspiré par le songe, je plonge, me ronge les ongles, et pour de bon je sombre.

Miroir glacé, cassé, passé ressassé, désire tout balancer, sa mission : pouvoir se gausser. Dans l’instant, une session de souci, il a tout essayé, se saouler, même jusqu'à consulter un sorcier. Il rêvait de gosses, de zouz, de percer sans se forcer, de subsister sans persister et voulait pas qu’on le pousse. Il ne cessait de caresser l’espoir mais se sentait possédé. Sarcastique et sournois hélas il était lassant et lassé.

Des fantômes dans l’estomac. Magie, sky coca. Malice improbable. Assez peu d’analyse. Une souris, un cobra. Je souris, trop tard. Ne mens pas, connard, toute l’histoire tient dans une valise. Tous se salissent, feignent d’être fiers. Tous se rallient sous la bannière d’un autre ciel. On a l’art et la manière, et sous mes cris les frères palissent. Me la fait pas à moi, on veut tous boire au calice.

Du cristal dans les pupilles, je me dis que c’est énigmatique. Hypocrisie collective, crier devient inutile. Chrysanthèmes et compagnie, faux sourires et pacotilles, cordelettes et fusils. Deux ou trois faux amis, parce qu’on a tous peur de l’être. Comme tout est déjà écrit, y a plus rien à faire, paraît-il. Par ici les âmes se perdent, tandis que les corps espèrent. Est-ce par négligence ? Y a plus de confiance, on vit une sale époque dans une sale ambiance âcre. Amers souvenirs, plus de quoi sourire, un dernier soupir. Un dernier souffle, je ne veux plus souffrir. Tout se fixe, les esprits se figent. Mutation cérébrale, je ressens l’effet d’un fixe, m’envahit une douceur brutale.
Samedi après-midi. Une clope, une corde, une balle.

A l’instant où je l’ai aperçu pour la dernière fois, son regard était si cru que j'ai cru qu’il voulait me tuer moi. Heureusement que son collier, qui était relié au lustre, l’empêchait d’avancer vers moi, l’illustre inconnu multicolore, pétrifié par la haine qui jaillissait de ce regard, comme un poisson meurt dans la seine. J’ai eu peur trois secondes, après j’étais terrorisé, sachant que sa réincarnation allait peut-être se dérouler dans une imminente seconde, ou alors juste l’instant d’après. Saisi par sa détresse et mon envie d’hémoglobine, je me presse de saisir une cartouche et la carabine. J’abrège ses peines, porté par le dégoût de le voir souffrir. J’allège les miennes profitant de mon dernier soupir. Ma froideur est égale à celle du canon de l’engin. Appartement mental béant, il souille la glace de la salle de bain. Pression digitale, départ de balle, pâtée pour chien.

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